Témoignage

Sortie de l’état de sidération, 23 mars 2020

La semaine passée, il s’est imposé à moi une nécessité absolue de commencer ce blog afin de rester connectée avec vous dans ces temps de confinement où chacun.e doit s’isoler un peu plus des autres. Période planétaire bien étrange, un tant soit peu surréaliste mais pourtant bien présente.

Avant toute chose, je tiens à vous partager de la manière la plus authentique possible ce qui s’est passé en moi depuis lundi 16 mars et pourquoi j’ai décidé de vous écrire pour rester en lien avec vous. Vous êtes tous et toutes, à chaque âge de vos existences, cher.e.s à mon cœur. Cette rupture de contact avec vous, que j’accompagne chaque jour, fut un véritable choc sans que je puisse le réaliser au début de la semaine dernière.

Ce n’est que le 19 mars, après des errances dans mon appartement, essayant vainement d’activer mes ressources construites au cours de toutes ces années de vie que j’ai enfin pu assimiler la réalité de mon état. La situation abrupte à laquelle nous sommes confrontés nous force à un changement radical de nos comportements : ne plus avoir le droit de travailler, limiter nos sorties au strict minimum, réduire drastiquement nos contacts sociaux. J’ai traversé différents états émotionnels, un inconfort corporel et de nombreuses réflexions jusqu’à pouvoir identifier enfin ce qui me bouleversait tant. Je l’appellerai « état de sidération » : une perte complète de mes repères habituels, une désorientation, des émotions très diverses avec une difficulté à y accéder, une nécessité absolue de rester connectée avec l’évolution de la situation au travers des médias. Auparavant dans ma vie quotidienne, je ne laissais que peu de place à cette façon d’être en lien avec l’information car elle est généralement anxiogène et peu nourrissante pour moi. J’avais l’habitude de l’écouter de loin, tout en restant cependant informée mais en nourrissant d’autres priorités : une connexion régulière avec la Nature qui me ressource, la qualité de relations sincères et profondes avec mes proches et cela va sans dire, avec vous qui poussez la porte de mon cabinet tous les jours et qui m’accordez votre confiance.

Cette force incroyable et ce besoin humain de se relier à l’autre m’a donné la direction pour sortir de cette inertie et de cette sidération, de cet état contraint où mon élan de partage et de soutien a été arrêté comme en plein vol, de plein fouet.

Donner de l’aide, créer un blog, partager dans ce monde figé, presque irréel, mais continuer à garder le sens de ce qui constitue le fondement de mon être : être en lien. Retrouver l’essence de ce qui me porte, de ce qui m’anime tous les jours de ma vie. L’avoir reconnu et identifié m’a permis d’initier ce mouvement vers vous. Mon cœur est plus léger et joyeux puisque son élan de partage et de soutien peut venir vers vous au travers de ces mots.

Je n’ai pas la moindre idée de demain, du chemin, mais il est à parcourir et je sortirai grandie, plus forte. Un immense processus est en cours en chacun.e, dans lequel tout bouge et change à chaque instant. Il demande de la conscience et de la présence ! Pour certain.e, il est éprouvant, pour d’autres plus tranquille et le challenge à venir est de rester proche de nous mêmes, de nos valeurs, incarné dans notre corporalité, et ne pas oublier que nous sommes tous reliés. 

La qualité de nos liens et de connexion les un.e.s avec les autres participe tous les jours à la co-régulation de nos systèmes nerveux. Nos confinements nous éloignent de ce besoin fondamentalement humain, nous isolent de nos amis et des êtres qui nous sont chers, des sourires échangés avec des inconnus, des gestes bienveillants les un.e.s envers les autres et de nos repères si familiers. Leurs absences nous mettent à l’épreuve. Nous dansons une drôle de danse avec nos concitoyens à 2 m de distance avec quelques pas chassés de coté !

Nous vivons une période inédite et nous augmentons la dérégulation de nos systèmes nerveux, de nos émotions. Nos croyances volent en éclats, la perte de nos repères est impressionnante et extrêmement fragilisante, notre énergie baisse, les émotions comme la peur et l’inquiétude sont génératrices d’anxiété, de tristesse voir de colère ou de déni et continuent à aggraver cette dérégulation. Ce que certains d’entre nous vivent est réellement difficile, ce qui est « normal » au vu de l’anormalité de cette situation ! 

Comment procéder pour alléger l’impact de cette nouvelle façon de vivre sur notre état émotionnel et nerveux ? Prenons donc conscience que la première partie de ce processus est une sidération : un état de choc qui paralyse, qui fige notre système nerveux et tout notre Être. Une première phase pour en sortir serait d’identifier et d’essayer d’accueillir les émotions en présence sans être submergé.e par elles. Il pourrait être nécessaire de demander un contact, sentir que vous pourriez avoir besoin d’aide pour sortir de cet état étrange, accepter de le demander. Une demande toute simple, rien de bien compliqué : « Serais-tu disponible pour un moment avec moi ? ». Simplement et vous pourriez apprécier le moment que l’autre vous offre vraiment, dans toute sa disponibilité. Ce moment de partage sincère et vrai agira comme une lotion sur votre cœur, vous redonnant la joie simple du partage et un antidote puissant à toute émotion trop intense. Une étape indispensable pour défiger les émotions que vous n’étiez pas à même de sentir ou percevoir. La deuxième phase serait d’accueillir les émotions telles qu’elles viennent, leur donner le temps d’exister dans le présent, les re-connaitre, les re-ssentir dans le corps car elles ont une expression bien corporelle. De façon concomitante, se donner ensuite des espaces pour Être avec soi, rien qu’avec soi et écouter les mots du dedans, ceux du corps, des émotions, des pensées. Enfin agir avec des ressources ciblées (j’y reviendrais dans un autre article) qui vous oriente dans le présent. Il est aussi important de stopper le flux anxiogène des informations en continu pour revenir dans un présent connecté à soi et de rester concentrer sur ce que vous pouvez contrôler ici et maintenant.

Acceptez que le tout est un processus et que chacun.e avance à son rythme. Votre processus est unique et vous allez sortir de cet état !

L’une des plus grandes ressources pour nos systèmes nerveux est de rester connecté.e les un.e.s aux autres par l’intermédiaire de nos visages. Ainsi, même à distance, Skyper, Zoomer, Facetimer, avec les gens que vous aimez et avec lesquels vous ne pouvez pas être en présence vous aidera plus facilement à vous réguler. Préférez ce type de médias aux messages textes et audio, et essayez de vous connecter à vos sensations corporelles alors que vous êtes en lien visuel et auditif avec les autres. Reliez vous à votre corps pour sentir combien il se relâche, se détend et se régule.

Je suis là, près de vous, juste à coté.

Je respire plus lentement, plus profondément et plus régulièrement avec vous tous et je vous transmets le calme intérieur et l’élan créateur réapparu après le tempête de la dernière semaine.

Je terminerai, pour aujourd’hui, avec ces mots de Djalâl-od-Dîn Rûmî, grand poète Soufi :

« Tu ne peux te libérer du monde 

en prêtant l’oreille,

Tu ne peux te libérer de toi même 

par beaucoup de paroles, 

Tu ne peux être libéré de tous les deux

du monde et de toi-même 

sauf par le silence »

Afin de protéger votre confidentialité, merci de mettre un prénom d’emprunt lors de vos commentaires, je vous découvrirai lorsque nous nous nous retrouverons !! J’attends vos remarques et demandes afin de pouvoir vous soutenir à distance.